Economie

Travailler de l’autre côté du Rhin, ça se prépare 

Si l’emploi en Allemagne et en Suisse est une réalité pour 14,5 % des actifs haut-rhinois, franchir le pas ne s’improvise pas. Reportage à l’occasion du 11e salon « Warum Nicht ? », organisé par la MEF 68, à Mulhouse.

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Selon France Travail, 22,5 % des demandeurs d’emploi se déclarent prêts à travailler de l’autre côté de la frontière.

Selon France Travail, 22,5 % des demandeurs d’emploi se déclarent prêts à travailler de l’autre côté de la frontière.

Oceane Kasonia

Pour la onzième édition de « Warum Nicht ? », jeunes, demandeurs d’emploi, recruteurs et formateurs se sont retrouvés, le 17 septembre sous le même toit du Parc Expo, pour explorer ce que l’Allemagne, et parfois la Suisse, peuvent offrir aux Mulhousiens en quête d’opportunités d’emploi. Parmi les stands, celui de la Chambre franco-allemande de commerce et d’industrie où Janet Ladwig et Rose Nozahic, toutes deux passées par Erasmus et des stages à l’étranger, insistent sur l’importance de l’expérience internationale. « Chaque fois que j’ai pu partir à l’étranger, j’ai gagné en autonomie et en confiance. Dans le monde du travail, ces expériences sont très appréciées par les recruteurs », explique Janet, qui alterne avec aisance le français et l’allemand. Ici, la mobilité n’est pas une théorie : c’est un atout concret qui ouvre des portes et façonne les parcours.

Se former avant de franchir le Rhin

Rose et Janet Ladwig, toutes deux passées par Erasmus et des stages à l’étranger, insistent sur l’importance de l’expérience internationale.

Rose et Janet Ladwig, toutes deux passées par Erasmus et des stages à l’étranger, insistent sur l’importance de l’expérience internationale.

Océane Kasonia

Pour Jean-Marc De Cruz, formateur pré-insertion à l’AFPA de Mulhouse, un passage en formation est une étape clé, avant de s’aventurer vers la frontière. « Pour trouver un emploi, il vaut mieux être qualifié. La formation reste le meilleur moyen de se préparer », souligne-t-il. Ses stagiaires se destinent à des métiers recherchés : chauffagistes, électriciens du bâtiment, techniciens en usinage très demandés en Suisse, mais aussi assistants administratifs.

Les réalités du marché allemand

Le dispositif LLTI, en partenariat avec France Travail, accompagne les demandeurs d’emploi dans leur parcours transfrontalier. Lucie, coordinatrice, insiste sur les différences culturelles entre la France et l’Allemagne : « En Allemagne, le dossier de candidature doit être très complet, avec diplômes, expériences détaillées et parfois photo. Les recruteurs sont exigeants, surtout sur la langue. Mais certains métiers, comme la logistique, restent accessibles, même avec un niveau faible. » À quelques mètres de là, le Service für Grenzüberschreitende Arbeitsvermittlung, coopération entre France Travail et l’Agentur für Arbeit de Fribourg, confirme : « La langue reste la clé. On peut décrocher certains postes avec un niveau A2, mais globalement, les employeurs attendent au moins le niveau B1 ou B2. Les secteurs les plus demandeurs restent la santé, la restauration, la logistique et le bâtiment. »

Des parcours individuels

La langue reste souvent la clé pour décrocher un emploi outre-Rhin.

La langue reste souvent la clé pour décrocher un emploi outre-Rhin.

Océane Kasonia

Dans les allées du Parc Expo, Saber, 38 ans, attend patiemment son tour pour faire relire son CV. Cariste de formation, il lorgne sur l’Allemagne. « En Allemagne, c’est plus simple qu’en Suisse parce qu’ils ne demandent pas forcément l’allemand. Je commence là-bas, j’apprendrais sur le tas, et, plus tard, pourquoi pas la Suisse ? » Un peu plus loin, ce sont des lycéens de 15 ou 16 ans qui découvrent le forum avec leur classe. Hugo apprécie de « changer du quotidien », grâce aux conférences. Pharrell, lui, se projette déjà : « J’ai envie de travailler en Suisse, car le salaire paie bien. Mais l’allemand, je n’aime pas ! » Corentin et Nadir ne disent pas autre chose : ils rêvent d’horizons internationaux, mais se sentent freinés par les langues. Un constat partagé par beaucoup de jeunes Mulhousiens, même si la conférence « Comment postuler en Allemagne ? » a éveillé leur curiosité.

Au fil des témoignages, une évidence s’impose : l’Allemagne et la Suisse restent des terres d’opportunités. Elles attirent par leurs salaires, leur dynamisme industriel, leurs besoins en main-d’œuvre. Mais elles posent aussi un défi : la langue, la reconnaissance des diplômes et l’adaptation culturelle…

Par Océane Kasonia

Chiffres

  • 1 066 postes déclarés vacants par les entreprises de la ville de Fribourg, ainsi que dans les districts de Brisgau-Haute-Forêt-Noire et d’Emmendingen. Secteurs les plus demandés : services aux entreprises, services scientifiques, techniques et libéraux, puis santé et action sociale, commerce, industrie manufacturière et administration publique.

  • 14,5 % des actifs haut-rhinois exercent dans un pays voisin, soit 47 789 travailleurs, selon le dernier recensement INSEE, dont 89% en Suisse et 11% en Allemagne.

  • 22,5 % des demandeurs d’emploi déclarent être prêts à travailler de l’autre côté de la frontière.

    Sources : MEF 68, avec Bundesagentur für Arbeit et France Travail.

Publié et mis à jour le 22 sept.