Pascal Bride sur la ligne d’arrivée de sa carrière musicale

Après 45 ans à l'Orchestre national de Mulhouse, Pascal Bride jouera ses derniers concerts au mois d'avril.
―Christophe Schmitt« Ma mère était passionnée de musique mais n’a jamais eu la chance d’en faire. Lorsque nous avions huit ou neuf ans, elle nous a inscrit, ma sœur et moi, à l’école de musique. Elle au violon, moi à l’alto, pour que nous puissions jouer en duo », se souvient Pascal Bride. Si sa sœur range rapidement son instrument, Pascal, lui, tombe sous le charme de l’alto et rejoint une classe à horaires aménagés musique à Besançon, avant de poursuivre un cursus classique, en intégrant le Conservatoire national de Paris et, en parallèle, l’École normale de musique de Paris. « Ce sont des lieux de haut niveau pour apprendre la musique, explique le musicien. Mais ces formations donnent des diplômes, pas un boulot. Dans notre métier, pour entrer dans un orchestre, il faut gagner un concours et les places sont très chères ! »
« Le niveau a énormément évolué »
Après son service militaire, effectué à Suresnes, évidemment dans la musique militaire, le Jurassien d’origine prépare ses concours pour intégrer un orchestre. Malheureux à Nantes et Lyon, il tente sa chance à Mulhouse, presque par hasard. « Ce n’était pas loin de Besançon, où j’habitais alors avec mes parents. J’avais prévu de faire le concours pour entrer à l’orchestre de Monte Carlo et le programme demandé à Mulhouse était le même, j’y suis allé pour préparer Monte Carlo ! » Recruté par l’Orchestre symphonique de Mulhouse (devenu Orchestre national depuis, lire notre article), il ne se rend finalement pas à Monaco et intègre l’OSM le 10 avril 1980. « Avant, la salle de répétition était au sous-sol du bâtiment du Ballet du Rhin et on jouait au théâtre de la Sinne », se souvient le musicien, qui a vu La Filature se construire et l’orchestre évoluer, au fil des ans. « Le niveau général de l’Orchestre a énormément évolué et c’est la qualité des chefs qui fait ce niveau, confie Pascal Bride, qui a connu pas moins de sept chefs d’orchestre durant sa carrière. Chacun a apporté sa pierre à l’édifice et l’arrivée de Christoph Koncz est un plus pour l’Orchestre : il a apporté une dynamique musicale, technique et artistique, avec lui, on progresse beaucoup ! »
Des moments d’émotion musicale

Pascal Bride, lors d'un concert, en octobre 2018.
―Archive Catherine Kohler« L’alto est un instrument de quatuor, quasiment jamais mis en avant dans le répertoire, contrairement au piano, au violon ou à la trompette, expose le musicien, entré à l’OSM comme altiste, puis deuxième soliste et soliste. J’ai eu beaucoup de chance, tous les chefs m’ont permis de quitter mon rôle d’alto solo dans l’orchestre pour être soliste avec mon instrument ! » Parmi les moments forts qui ont marqué sa carrière musicale, Pascal Bride retient notamment ses solos sur Harold en Italie de Berlioz ou sur la Rhapsodie pour alto de Bohuslav Martinu. « La Symphonie Concertante de Mozart pour violon et alto également, l’un de mes plus grands moments de musique, quand je deviens soliste sur scène, avec Augustin Dumay ! J’ai aussi adoré jouer des compositeurs allemands romantiques comme Bruckner ou Mahler, ou des ballets comme Gisele ou Le Lac des cygnes, où l’alto a une partie riche, c’est toujours un moment d’émotion musicale ! »
« Je préfère ne plus jouer que mal jouer »
L’émotion devrait s’intensifier ces prochains jours pour Pascal Bride, qui jouera son dernier concert symphonique, « Les Princes russes », ce week-end à La Filature (complet), avant de remonter sur scène une dernière fois avec l’Opéra national du Rhin pour trois représentations de La Traviata. « Le 29 avril, la dernière note de la Traviata sera ma dernière note de musique, confie le presque-retraité. C’est tellement difficile de garder l’exigence du niveau, mon défi personnel est de rester optimum jusqu’à la dernière note. Ces cinq dernières années, j’ai senti que j’étais moins performant, si je continue, je vais bricoler… Je suis perfectionniste, je préfère ne plus jouer que mal jouer, j’ai déjà vendu mon archet et mon alto, qui poursuivra sa carrière à l’orchestre de Bâle, je pourrai aller l’écouter ! »
Plus de 20 000 km de vélo par an et de beaux objectifs

Le musicien est aussi un virtuose de la petite reine et parcourt plus de 20 000 km par an.
―Christophe SchmittCeux qui ont déjà croisé la route de Pascal Bride savent que, derrière le musicien, se cache également un grand sportif. D’abord tennisman en 2e série, le Mulhousien s’est trouvé une passion pour le cyclisme il y a 25 ans. « Je me suis mis au sport pour garder la forme et trouver un équilibre avec les difficultés techniques, la concentration et l’exigence de mon métier ». S’il parcourt 20 à 25 000 km sur son vélo chaque année, « Bridou », comme l’appellent ses amis cyclistes, l’assure : « Je ne vais pas en faire plus, mais mieux. Je vais prendre un peu de temps libre pour moi, il faut que j’apprenne à me reposer ! » Quelques jours après sa retraite, il participera à la Traversée de France sur les routes blanches (1 800 km en sept jours), avant de prendre la route de la Réconciliation de Leipzig à Strasbourg (1 600 km), puis celles des Three Peaks (de Vienne, en Autriche à Nice) et de Londres-Edimbourg-Londres… Tous les retraités n’ont pas la même conception du repos !
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