Suivez-nous :

14 mars 2021 à 9h03 par 2 226 0

Motoco : « On rêve beaucoup mais on réalise une bonne partie de nos rêves »

Motoco : « On rêve beaucoup mais on réalise une bonne partie de nos rêves » | M+ Mulhouse
Motoco : « On rêve beaucoup mais on réalise une bonne partie de nos rêves » | M+ Mulhouse

Motoco : « On rêve beaucoup mais on réalise une bonne partie de nos rêves »

14 mars 2021 à 9h03 par 2 2260

Téléchargez notre application mobile pour Android ou pour iPhone !

Temps de lecture : 4 minutes

Au cœur du site DMC, dans le bâtiment 75 laissé vide par l’entreprise textile, Motoco accueille pas moins de 125 artistes. Entretien avec Martine Zussy, véritable « capitaine » de ce navire créatif, depuis 2018.

C’est quoi Motoco, en 2021 ?

Motoco, c’est un lieu qui héberge deux activités : d’une part une résidence d’artistes et, d’autre part, un lieu de vie ouvert au public. Tout ça fonctionne de façon extrêmement vertueuse et l’objet de Motoco est de soutenir la création artistique. Tout ce qu’on fait converge vers ça. Deux tiers du rez-de-chaussée sont aux normes d’accessibilité au public et accueillent nos événements ou ceux organisés par d’autres. Nous accueillons des événements culturels mais aussi des événements professionnels d’entreprise. Nous exploitons aussi les espaces extérieurs, cet été nous avions la guinguette et on prie pour en ouvrir une nouvelle cet été !

Vous avez rejoint l’aventure Motoco en 2018, quels changements avez-vous apportés ?

On a structuré les choses. On a, aujourd’hui, une organisation qui porte la responsabilité de ses décisions. On est dans quelque chose de très partagé et de très ouvert et en même temps, extrêmement structuré économiquement et juridiquement. Ce qui impose aussi des règles : il faut faire plus d’efforts aujourd’hui pour conserver sa liberté. On a augmenté les résidents, en nombre mais aussi en qualité. Aujourd’hui, 90% des résidents sont professionnels et n’ont pas d’autre job à côté, ce qui change les problématiques. Et puis, on a développé le lieu de vie, il se passe énormément de choses ici, on a réussi à avoir une population très hétéroclite avec à la fois les gens du quartier, les bobos, les cultureux, les jeunes… On attire une bonne représentation de notre territoire et au-delà. On a une connexion extrêmement vertueuse entre le monde politique, le monde économique, le monde artistique et les citoyens.

L’année 2020 a marqué un coup d’arrêt…

Depuis mars 2020, on a eu quatre mois d’ouverture. Cet été, on a eu essentiellement la guinguette. Les événements se préparent très en amont, donc en gros, il n’y a rien eu. D’un coup, on a 80% de notre chiffre d’affaires qui a disparu. Très vite, on s’est dit que là-haut, chez les résidents, il fallait qu’aucun ne tombe, c’était la priorité. Les artistes ont continué à travailler et on a gardé ce travail quotidien, y compris lors de la période confinée. Si les gens ont un atelier ici, c’est qu’ils ne peuvent pas travailler chez eux ! On a gardé émotionnellement, économiquement, intellectuellement tout le monde. Il y a eu énormément de solidarité, comme jamais ici ! On a même monté un magasin alimentaire gratuit pendant le premier confinement, tout s’est bien passé. La guinguette, cet été, a été un facteur de rapprochement entre les artistes et avec le public, ça nous a fait un bien fou, en septembre on était prêts à tout défoncer ! Quand la deuxième vague de restrictions est arrivée, c’est un autre sujet, il n’y avait plus l’énergie de départ. On passe de la colère au désespoir et c’est sans fin. On n’est plus en lutte émotionnelle depuis mais on continue à bosser, on a beaucoup de projets économiques. Certains projets artistiques fonctionnent très bien.

Dans quel état d’esprit étaient les artistes ?

Au premier confinement, il y a eu une angoisse terrible. On a cette situation d’urgence, ces hélicoptères qui sont au-dessus de la tête, ça installe une situation presque de guerre, où la solidarité est le premier réflexe. Au deuxième confinement, il y a eu une prise de conscience beaucoup plus présente, qu’on peut être malade. Ici on a des gens qui sont fragiles, la préoccupation est aussi là. Pour nous, la vie ne ressemble pas à ça, avec beaucoup de peurs et de mal à trouver l’énergie, mais la chance aussi d’être dans un milieu familial. Motoco touche enfin le fonds de solidarité et on a aidé les artistes à toucher ce à quoi ils avaient droit, ce qui n’était pas évident. Tout le monde est debout mais il ne faudrait pas que ça dure un an encore !

Vous avez également accueilli des étudiants…

Un soir, je rentre de Motoco, et j’allume ma télé, je tombe sur un étudiant qui raconte son désespoir. Je connais la situation des étudiants mais là, j’ai un mec en face de moi et je ressens les choses de façon différente, je prends la mesure du truc. Il dit qu’il est tout seul, qu’il n’a que son lit et quelques mètres autour pour dormir, manger, bosser et, à 18h, il n’a plus le droit de sortir… C’est l’enfer ! Je me dis qu’on a des espaces dingues, qui peuvent être chauffés, on peut isoler les gens et on n’en fait pas bénéficier… C’était du bon sens. Je lis dans les textes de loi que les salles fermées administrativement peuvent ouvrir pour des actes de solidarité en direction de publics précaires, on s’est donc lancés et avons ouvert avec 6 places. Nous avons le droit d’en accueillir six, pas un de plus. Tous les jours, on a des étudiants, on leur offre le repas, c’est l’effort de Motoco. Très honnêtement, je n’avais pas mesuré l’ampleur des dégâts chez ces jeunes. Je suis très inquiète, je ne sais pas comment les jeunes vont en sortir…

Comment voyez-vous la suite ?

On a une programmation à partir du mois d’avril, à partir de juin on est plutôt plein. Avec des choses qui sont susceptibles de s’annuler évidemment, parce qu’on ne sait pas. Personnellement, je pense à un redémarrage, à un vrai rythme, en septembre. J’espère un été avec une guinguette et m’en réjouis. C’est vrai que, comme on a développé des sources de revenus différentes de l’événementiel, je ne suis pas sûre qu’on reviendra à un rythme aussi soutenu que ce qu’on a fait jusqu’à présent, par choix. J’espère qu’on pourra se permettre une offre culturelle plus riche. On développe aussi des partenariats avec des structures hors du territoire, j’espère ramener des choses nouvelles. On rêve beaucoup mais on réalise une bonne partie de nos rêves ! Quand je vois les talents qui montent, l’exigence de travail, je suis très optimiste sur le développement de Motoco !

+ d’infos sur www.motoco.fr et www.facebook.com/motocoandco

Print Friendly, PDF & Email

Discuter

Laisser un commentaire


En cliquant sur "laisser un commentaire", j'accepte que mon commentaire soit publié publiquement sur cette page et que mon adresse IP soit enregistrée pendant 3 mois et utilisée par mplusinfo.fr à des fins de modération.

M+, l'info de Mulhouse

GRATUIT
VOIR