Initiative

Elles pédalent contre le cancer et pour la vie

Ce jeudi matin, 11 septembre, l’excitation était palpable devant le Rugby club de Mulhouse. Casques ajustés, maillots roses et sourires déterminés : une vingtaine de femmes s’apprêtait à monter en selle pour quatre jours d’aventure le long du Rhin. À première vue, un simple défi sportif. Mais derrière ces 240 kilomètres à vélo, se cache bien plus : une leçon de courage et un hymne à la vie, portée par l’association En avant les Amazones !

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Parties le jeudi 11 septembre, les "Amazones" seront de retour ce dimanche 14 septembre à 15h, au Rugby club de Mulhouse.

Parties le jeudi 11 septembre, les "Amazones" seront de retour ce dimanche 14 septembre à 15h, au Rugby club de Mulhouse.

Océane Kasonia

Une association née pour l’après-cancer

Créée en 2018 par des femmes malades pour des femmes malades, l’association mulhousienne célèbre cette année son huitième tour à vélo. Son objectif : permettre à celles qui ont traversé un cancer, ou qui sont encore en traitement, de se reconstruire à travers un projet collectif et sportif. « Nous voulions prouver qu’il existe un après, que l’histoire ne s’arrête pas à la maladie », explique Élodie, responsable communication et membre depuis 2019. Huit ans plus tard, l’énergie est intacte. Chaque édition attire de nouvelles participantes, venues de toute la région, grâce au bouche-à-oreille, aux réseaux sociaux ou aux médecins qui parlent de l’association à leurs patientes.

Quatre jours, 240 kilomètres et beaucoup d’émotions

Le programme de cette édition : un départ en bus vers Karlsruhe, puis quatre étapes successives – Karlsruhe-Rastatt (40 km), Rastatt-Strasbourg (60 km), Strasbourg-Biesheim) (70 km) et enfin retour à Mulhouse dimanche 14 septembre. « On adapte les trajets, notamment pour celles qui sortent à peine de traitement. L’important, c’est que chacune puisse aller à son rythme », souligne Priscille, infirmière bénévole de l’association, qui accompagne le groupe depuis 2020. La sécurité est au cœur de l’organisation : recueil d’antécédents médicaux, matériel d’urgence offert par des partenaires, médecins et voiture-balai toujours présents. Mais pour Priscille, « le but, c’est que je ne serve à rien. Ce serait l’idéal, et c’est le but de ma vie. »

Le vélo, un vecteur d’espoir

Pourquoi le vélo ? Parce qu’il est accessible à toutes. Certaines pédalent sur des vélos électriques, d’autres sur des modèles classiques. « Grâce au vélo, même celles qui ne sont pas sportives peuvent participer », insiste Élodie. Au fil des kilomètres, les corps se dépassent, et les esprits s’élèvent : « Se dire qu’après des traitements lourds, on est capable de parcourir 250 km en quelques jours, c’est formidable. Ça redonne confiance en soi… et en l’autre. »

Pour être honnête, je ne voulais pas retrouver des femmes qui parlent uniquement de leur passé de cancer. Ici, c’est tout l’inverse : on regarde vers l’après, vers le futur. C’est extraordinaire.
Une Amazone
Priscille, Maryse et Christelle...

Priscille, Maryse et Christelle...

Océane Kasonia

Des femmes tournées vers l’avenir

Dans le groupe, les âges varient de 30 à 75 ans. Une diversité qui reflète la réalité de la maladie, mais aussi sa capacité à créer des liens inattendus. Maryse, septuagénaire membre depuis 2018, se souvient : « Au départ, c’était l’activité sportive qui m’a poussée à participer. Pour être honnête, je ne voulais pas retrouver des femmes qui parlent uniquement de leur passé de cancer. Ici, c’est tout l’inverse : on regarde vers l’après, vers le futur. C’est extraordinaire. » Pour beaucoup, l’association est une bouée après la tempête.

« Quand on termine les traitements, on se retrouve souvent seule. Les médecins s’arrêtent là, et c’est normal, mais on a besoin d’autre chose. L’association, c’est comme une continuité des soins. C’est aussi important qu’un suivi à l’hôpital », confie la septuagénaire. L’infirmière, Priscille renchérit : « Il faut dire que quand on est en plein dans la maladie, on voit noir, on n’arrive pas à prendre du recul. Le témoignage des filles quand elles arrivent, quasi toutes, c’est qu’elles sont étonnées que les autres aient des cheveux ! On n’arrive même pas à se voir un an plus tard. On est dans l’instant présent et non dans l’après. Le fait de voir les autres, on réalise qu’il y a un après, et quel bonheur. »

C’est justement à ce moment que Christelle, toujours en traitement, interrompt la conversation pour offrir aux participantes de petits cœurs roses qu’elle a crochetés elle-même. Un geste discret mais fort, qui résume l’esprit de ces Amazones : le partage, l’espoir et la solidarité. Au-delà de l’effort physique, l’esprit de fête est omniprésent. Rires, complicité, fous rires partagés… « Ces quatre jours nous portent pendant des semaines », résume Maryse. L’arrivée à Mulhouse, prévue dimanche 14 septembre à 15h sera l’occasion de célébrer ce défi. Familles, amis, partenaires et soutiens de toujours, comme Icebike, le club de rugby ou la Ville de Mulhouse, tout le monde est invité à accueillir les Amazones au club de rugby de Mulhouse, autour d’un pot de l’amitié.

Une force collective

Sans subventions, l’association vit uniquement grâce aux dons, aux événements caritatifs (comme Octobre Rose) et à la générosité de ses partenaires. « C’est grâce à eux que nous pouvons offrir à ces femmes une ouverture sur la suite et des expériences extraordinaires », souligne Élodie. Et au-delà des kilomètres avalés, le message est clair : la maladie ne doit pas être une fin, mais un début. « En selle, on se rend compte qu’il y a un après. Qu’on peut bouffer la vie. C’est ça, le vrai exploit », résume Maryse, le regard pétillant. À travers ces 240 kilomètres, ces femmes prouvent qu’il est possible de transformer la douleur en énergie, la solitude en solidarité, et la peur en espoir. Alors, lorsqu’elles s’élanceront dimanche vers leur arrivée triomphale, ce ne sera pas seulement une victoire sportive. Ce sera un cri du cœur, porté par toutes celles qui refusent de se laisser définir par la maladie : « En avant les Amazones ! »

Par Océane Kasonia

Publié le 12 sept.